Sale temps pour les piafs

Excusez-moi de dire ça, mais Dame-Nature est vraiment une belle salope. À quoi ça sert de se faire chier tout le printemps avec les parades amoureuses, la nidification, la couvée et l'éducation des petits, si c'est pour qu'une stupide bourrasque vienne tout foutre par terre ?

Catastrophe thermonucléaire chez les pies. Leur oisillon, sûrement le dernier de la nichée vu la taille, a été emporté par le vent. Il a été sonné, le chien a voulu le bouffer, mais ça va, il se remet tranquillement dans mon sous-sol. Le problème c'est qu'une heure plus tard, une deuxième rafale a fait tomber la Villa des parents. Depuis, c'est la panique : ça s'agite, ça craquette à tout va, ça s'inquiète sûrement, mais je ne vois pas d'issue au problème. Sans nid, je peux pas leur rendre le petit : il va se faire bouffer par les chats du quartier dans l'heure qui suit.

Vous avez déjà vu un nid de pie ? C'est incroyable, le boulot que ça représente. Une base en grosses branches, puis des fondations en terre séchée, une charpente circulaire en brindilles de plus en plus fines, et à l'intérieur, un tendre coussin d'herbes fines. Des heures et des heures de boulot, une science innée de l'architecture, une intelligence pratique jamais démentie... Les promoteurs immobiliers feraient bien d'en prendre de la graine. J'aurais du mal à reproduire un ouvrage aussi fin avec mes mains, alors avec un bec... Quand on pense que ces oiseaux n'ont même pas d'assurance multirisque-habitation, ça file le vertige.

En attendant, me voilà tuteur légal d'une magnifique petite pie. Pour fêter l'adoption, elle m'a chié dessus deux fois, je sens que notre histoire est partie pour durer.

Du coup, je suis allé voir comment ça se passait chez les tourterelles. Rassurez-vous, ça tient le coup. Voilà de bons parents : depuis que les petits sont nés, on revoyait le couple Tourterelle sortir de temps en temps. Ils devaient se refaire les promenades de l'époque insouciante : un petit tour sur mon toit où ils se sont rencontrés, un autre sur la haie du voisin, une virée sur le lampadaire... Maintenant, je sais pourquoi on dit « des tourtereaux » pour désigner des amoureux : ces bestioles-là ne se déplacent qu'à deux. Mais le vent a commencé à souffler, alors Madame Tourterelle est illico retournée à son poste. Depuis, elle veille au grain, avec l'obstination qui la caractérise depuis qu'on s'est rencontrés.

Demain, je vous donnerai des nouvelles des hirondelles.